Les Editions Jean Paul Bayol
Contact
Publications
annexes
   

 

Pour un principe matérialiste fort

Compléments du livre
"Pour un principe matérialiste fort"

 

Retour au sommaire


La question des mathématiques

Toutes les sciences ont recours aux mathématiques, y compris la physique quantique.
Elles le font d'abord par commodité. Une équation ou une figure géométrique permet de se représenter un phénomène, sous forme de modèle, plus facilement qu'en utilisant les périphrases du langage courant. De plus, aujourd'hui, les ordinateurs peuvent faire tourner des équations complexes sans effort, faisant apparaître des résultats insoupçonnables par l'imagination. En ce sens, les mathématiques sont la représentation la plus fidèle qui soit du réel instrumental produit par l'homme, tel que défini ci-dessus : par exemple un pont, une fusée spatiale, une fonction biologique.

Mais les mathématiques sont-elles pour autant l'expression la plus fidèle qui soit d'un hypothétique réel en soi, à supposer que nous conservions ce terme ? Autrement dit, le réel est-il mathématique ?
Beaucoup de mathématiciens ont tendance à le penser(1). Mais il est difficile de s'en convaincre, car il n'est pas de mathématiques sans supports matériels ou biologiques (neurones par exemple). Un tissu cosmologique composé de mathématique paraît aussi improbable que s'Figure obtenue par automate cellulaireil était, comme le prétendent certains, fait d'informations. Des mathématiciens devenus informaticiens, comme Stephen Wolfram (Wolfram, op.cit.) prétendent d'ailleurs aborder l'ensemble des problèmes scientifiques du moment sans faire appel aux mathématiques, auxquelles ils substituent des automates cellulaires(2). Pour Wolfram, les mathématiques ne traitent que les questions qu'elles sont outillées pour résoudre. Elles ne cherchent donc pas à résoudre des questions qui pourtant seraient essentielles à la compréhension de beaucoup de phénomènes complexes. D'une certaine façon, elles interdisent même d'imaginer de tels phénomènes. On pourrait perfectionner les outils, comme le firent les grands mathématiciens du passé en inventant le calcul différentiel et le calcul infinitésimal. Mais encore faudrait-il que les mathématiciens d'aujourd'hui s'intéressent aux questions scientifiques qu'ils ne peuvent résoudre. Ils leur préfèrent généralement la théorie sans applications.

L'hypothèse que les mathématiques sont des constructions ou outils plus ou moins imparfaits dont l'évolution a doté les organismes vivants, en même temps qu'elle les dotait d'autres types de langages symboliques, pourrait être confortée par le fait que l'aptitude à dénombrer les éléments significatifs de l'environnement, comme d'ailleurs l'aptitude à construire des cartes géométriques de celui-ci, semblent très répandues, y compris chez des espèces qui ne sont pas considérées comme supérieures(3). Nous retrouvons alors l'hypothèse constructiviste. On construit les mathématiques dont on a besoin pour agir - ce qui justifie la revendication de scientifiques travaillant dans les secteurs émergents : donnez-nous les outils mathématiques qui nous manquent encore, au lieu de vous complaire dans la contemplation d'hypothétiques essences mathématiques.

1 : Un mathématicien français renommé, Alain Connes, parle de " mathématiques archaïques " qui constitueraient un univers profond indépendant des hommes et que le mathématicien aurait pour mission de découvrir, comme l'explorateur spatial découvre de nouvelles planètes. On lira de lui, notamment, Matière à penser (avec Jean-Pierre Changeux), Odile Jacob, 1989-2000 (rééditions).

2 : Voir chapitre 4.

3 : Des observations, toujours plus nombreuses, montrent que beaucoup d'animaux pourraient identifier et distinguer des groupes comportant de un à trois, voire cinq individus.

 

Retour au sommaire